Contribution à la concertation des parties prenantes dans le cadre du moratoire et de la refondation de la REP PMCB

Juin 5, 2025

Le SPREC

Le SPREC est le Syndicat Professionnel du Réemploi dans la Construction, il a été fondé en 2022 et représente 50 acteurs spécialisés dans les activités qui concourent au réemploi des matériaux de construction. En 2023 dans le cadre de la mise en œuvre de la REP PMCB, nous avons rédigé un plan d’action réemploi à l’intention des différents éco-organismes. Deux ans plus tard, au regard de l’enjeu et des difficultés rencontrées par les acteurs du réemploi dans la construction en France, nous avons jugé nécessaire de faire le point.

Le réemploi est un secteur dynamique et prometteur répondant aux enjeux actuels : il participe à la création d’emplois locaux, à la décarbonation du secteur de la construction et à la mise en place d’une industrie territoriale moins consommatrice en énergie et en matière première. La massification du réemploi dans le secteur de la construction nécessite des actions structurées et coordonnées. La REP constitue un levier déterminant de ce passage à l’échelle et de la pérennisation des filières. En effet, les éco-organismes ont pour mission de favoriser, par ordre de priorité, le réemploi, le recyclage et la valorisation des matériaux tout en répondant aux objectifs fixés par la réglementation, en particulier l’atteinte de 5 % en masse de produits réemployés sur la quantité totale de PMCB d’ici 2028. Pour cela, ils se doivent aujourd’hui d’intervenir à différentes étapes de la chaîne d’acteurs, dont ceux du réemploi, en structurant la filière dédiée et en renforçant le maillage territorial en conséquence. Aujourd’hui, nous constatons que les moyens pour y parvenir ne sont pas (encore) suffisants. En ce sens, voici en synthèse 5 actions qui répondent à cet enjeu : 

1. Maintien de l’objectif de 5% de réemploi d’ici à 2028 et conservation de l’ensemble des matériaux visés initialement dans le périmètre de la REP.

2. Soutien à l’unité de produits réemployés et non à la tonne avec des niveaux de soutien à l’échelle des investissements liés au réemploi. Nous demandons qu’a minima 5% des écocontributions soient dédiées au réemploi.

3. Organisation de la collecte de gisements à reconditionner depuis leur dépose jusqu’au site de reconditionnement et compensation de la reprise sans frais pour le recyclage par un soutien à la dépose sélective.

4. Soutien de la prescription en matériaux de réemploi, élément clé du développement des filières.

5. Transparence de la part des éco-organismes via un reporting annuel des financements fléchés vers le secteur du réemploi.

La suite du document explicite de manière détaillée ces propositions ainsi que d’autres solutions à mettre en œuvre.

Propositions du SPREC

  • Maintenir un niveau d’ambition fort, d’ici à 2028 pour le réemploi, avec 5% de réemploi. La conservation d’un périmètre général pour cette REP avec des écocontributions pour les inertes, le métal et le bois et des actions en vue de leur réemploi. En sus, les objectifs de réemploi doivent toujours être la priorité vis-à-vis des objectifs de recyclage.
  • Afin d’obtenir une garantie de soutien financier minimum et puisque le fonds réemploi n’a pas été adopté pour cette REP, nous demandons que le soutien des éco-organismes aux activités de réemploi représente 5 % a minima des éco contributions collectées. De plus, le soutien à la tonne pratiqué par les éco-organismes pour favoriser le réemploi dans le cadre du soutien est loin de correspondre à l’effort investi, nous demandons donc un soutien à l’unité tonne équivalent à l’euro investi comme cela est le cas pour le recyclage (i.e. granulat).
  • La demande en matériaux reconditionnés est de plus en plus forte mais les filières de reconditionnement ne sont pas encore assez structurées pour y répondre. Il est donc nécessaire de passer à l’étape de massification avec le soutien des acteurs clé comme les reconditionneurs, en organisant la collecte de gisement à reconditionner depuis leur dépose jusqu’au site de reconditionnement. Nous constatons que la reprise sans frais est néfaste pour le réemploi car le recyclage concurrence directement le réemploi, c’est pourquoi elle doit être repensée ou compensée par le soutien à la dépose sélective.
  • La prescription de matériaux de réemploi (en approvisionnement extérieur) est une des clés du développement des filières. Celle-ci doit être encouragée via des actions de sensibilisation et de soutien financier, voire incitée par la commande publique.
  • Demande d’une transparence de la part des éco-organismes via un reporting annuel des financements fléchés vers le secteur du réemploi parallèlement à celui du recyclage, avec le détail de leur répartition par catégories d’acteurs, d’activités et de matériaux, afin de pouvoir évaluer de manière concrète les actions mises en œuvre.

A noter que le fonctionnement actuel de la REP engendre une mise en concurrence entre les éco-organismes (tarifs d’éco contribution variables). Ce fonctionnement peut se réaliser au détriment de la qualité des prestations et des résultats, et met notamment en péril certaines actions favorables à l’ESS.

Les leviers de la REP PMCB à actionner

La REP joue un rôle primordial dans la viabilisation du réemploi par la sensibilisation des acteurs de la construction et la structuration des filières, de leur émergence à leur pérennisation. Pour cela nous souhaitons que les éco-organismes engagent des actions concrètes, orientées suivant 4 axes prioritaires : Le maillage territorial / L’approvisionnement en gisements bruts / La compétitivité économique vis à vis du neuf / La sensibilisation et la transparence.

Axe 1 : Renforcer le maillage territorial, par filière, de centres de stockage et reconditionnement

L’objectif est de proposer une offre de matériaux reconditionnés équivalente à celle des matériaux neufs sur l’ensemble du territoire national et sur chaque typologie de matériaux. Certaines filières permettent déjà de garantir des matériaux au même niveau que le neuf et ainsi de rassurer les acteurs, prescripteurs, acheteurs, installateurs et utilisateurs. Pour se développer, elles ont besoin de gisements brut, de foncier et de soutiens à l’investissement, à l’exploitation et à la recherche et développement. 

  • Soutien opérationnel à l’accès au foncier via un inventaire de fonciers disponibles et la mise en relation des bailleurs OU faire évoluer les « zones de dépôts réemploi » en les mettant à disposition des acteurs du réemploi afin qu’elles aient plus facilement accès à du foncier. [NON MIS EN PLACE]
  • Soutien financier à l’accès au foncier via un soutien à la location ou à l’acquisition.  [NON MIS EN PLACE]
  • Soutien financier à l’investissement lors de l’ouverture et/ou de l’amélioration d’un centre de reconditionnement et/ou stockage (travaux d’aménagement, matériels de production, main d’œuvre, etc…) auprès d’acteurs du réemploi. [EN COURS, INSUFFISANT]
  • Soutien financier à l’exploitation d’un centre de reconditionnement jusqu’à maturité industrielle (salaires opérateurs et encadrement, charges de fonctionnement – loyer, électricité, eau, etc…) auprès de reconditionneurs. [EN COURS, INSUFFISANT]

Axe 2 : Organiser l’approvisionnement en gisements bruts

Aujourd’hui l’approvisionnement en matériaux brut issus de chantiers qualitatifs (bien déposés et bien conditionnés) en vue de leur reconditionnement, est le facteur limitant de la fourniture en matériaux reconditionnés. En effet, la récupération de matériaux nécessite plusieurs étapes : repérer les bons matériaux sur les chantiers, organiser la dépose soignée, collecter et les transporter jusqu’au centre de reconditionnement. Aujourd’hui, elles sont souvent abandonnées au bénéfice du recyclage dont la prise en charge est gratuite. 

Dans cette partie, il est question de favoriser la dépose en vue du réemploi et de maîtriser la qualité des matériaux, de l’apport volontaire à la récupération par les acteurs du territoire.

  • Organiser l’approvisionnement gratuit en gisements bruts :
    • Financer le transport et la centralisation logistique des gisements issus de chantier de déconstruction/curage auprès de logisticiens. [NON MIS EN PLACE]
    • Financer la dépose sélective des matériaux auprès des maîtres d’ouvrage ou des Entreprises de déconstruction. [NON MIS EN PLACE]
  • OU mettre en place un véritable soutien financier à l’unité (et non pas à la tonne) directement auprès des reconditionneurs afin qu’ils soient en mesure d’acheter et d’assurer la livraison de gisements bruts de qualité à un prix permettant de compenser la dépose et la gratuité du recyclage. [NON MIS EN PLACE]
  • ET soutien financier à l’implantation de plateforme de centralisation logistique, afin d’optimiser l’approvisionnement en matériaux bruts, auprès des logisticiens. [NON MIS EN PLACE]
  • ET soutien financier aux entreprises ou maîtres d’ouvrage qui mettent en œuvre la dépose sélective en vue du réemploi sur la base des quantités de matériaux acheminés aux sites de reconditionnement. [NON MIS EN PLACE]

Axe 3 : Résoudre l’équation économique : « coût de revient de production » inférieur au « prix de vente matériaux reconditionnés » équivalent au « prix de vente matériaux neufs »

Le coût des matériaux de réemploi est aujourd’hui sensiblement supérieur à celui des matériaux neufs en comparaison à des gammes neuves moyennes et qui sont majoritairement produits hors de France. Or le coût de revient est très souvent supérieur au prix de vente, en raison des coûts liés à la dépose, au transport et à la main d’œuvre locale, qui représentent une part très importante du prix final. Plusieurs actions peuvent être mises en place pour que le réemploi parvienne à devenir compétitif avec le marché du neuf :

  • Soutien financier à l’unité de produits reconditionnés, avec des montants calculés par typologie de matériaux, en fonction de la faisabilité du réemploi et de la maturité de la filière (et non pas par catégorie de déchets) auprès de reconditionneurs. Aujourd’hui le soutien à la tonne permet à peine de couvrir les coûts liés à la déclaration du réemploi auprès des éco-organismes. Nous estimons que le soutien à l’unité du matériau reconditionné doit correspondre à 25% minimum du prix de vente. [EN COURS, A REVOIR].

A titre d’exemple :

CatégorieSoutien à la tonneSoutien unitaire% prix de vente
Sanitaire15€/t0,15€/uEnv. 0,1%
Faux Plancher245€/t1€/m²Env. 5%
  • Financement du coût net du réemploi auprès des acteurs de la filière. En comparaison, les éco-organismes soutiennent à l’euro dépensé les actions de recyclage (i.e. 5€/tonne pour le concassage des inertes). [NON MIS EN PLACE]
  • Soutien financier à l’implantation de plateformes de centralisation logistique, afin d’optimiser la fourniture en matériaux reconditionnés, auprès de logisticiens. [NON MIS EN PLACE]
  • Permettre un cofinancement auprès de différents éco-organismes afin d’augmenter les montants d’aide. La comptabilité des flux pourrait alors facilement être réalisée au prorata des soutiens obtenus. [NON MIS EN PLACE]

Axe 4 : Gouvernance, sensibilisation et transparence

Le réemploi des matériaux de construction souffre de nombreux aprioris. Si la structuration des filières permettra de faciliter le réemploi du point de vue opérationnel, seule une forte sensibilisation nationale saura activer et assurer la commande. Pour cela, un enjeu de transparence des financements et actions mises en œuvre est indispensable.

  • La gouvernance des éco-organismes est réalisée par les adhérents et donc les metteurs sur le marché. Les acteurs du réemploi ne sont pas automatiquement consultés et leur avis n’est que consultatif. De plus, il n’existe pas d’organisme de contrôle, ni d’encadrement pénalisant la non atteinte des objectifs.. Aussi nous proposons les actions suivantes :
    • Invitation obligatoire des acteurs du réemploi dans le comité des parties prenantes et droit de véto. [NON MIS EN PLACE]
    • Mise en place de sanctions ou de pénalités liées à la non atteinte des objectifs en réemploi. [NON MIS EN PLACE]
    • Assurer par l’Etat un suivi fin des objectifs à atteindre sur la base d’indicateurs précis. [NON MIS EN PLACE]
  • Obtenir de la part des éco-organismes un reporting annuel des financements fléchés vers le secteur du réemploi par rapport à celui du recyclage, ainsi que le détail de la répartition des financements par catégories d’acteurs, d’activités et de matériaux. Cette transparence permettrait d’évaluer la pertinence des moyens mis en œuvre par les éco-organismes pour soutenir le développement des filières de réemploi, composés d’acteurs émergents, contrairement aux filières du recyclage qui reposent sur un marché et des activités économiques établies. [NON MIS EN PLACE]
  • Partage de la part des éco-organismes, des résultats et des informations issus des projets financés. La filière du réemploi étant en rapide évolution, il y a un besoin de remontées d’information pour comprendre comment le financement des éco-organismes améliore le secteur du réemploi et ainsi mieux coordonner les actions visant à son développement. Dans cette même logique, le brevetage des solutions financées par les éco-organismes ne doit pas être possible. [NON MIS EN PLACE]
  • La prescription, et donc la commande en matériaux de réemploi, est une des clés du développement des filières. Une fois développées, elles rassurent les prescripteurs, acheteurs, assureurs, et participent au développement de la demande. Ce cercle vertueux démarre notamment par une commande initialement innovante et ambitieuse puis entre dans les pratiques courantes une fois la filière structurée. Actuellement, aucune réglementation n’oblige la commande, ni à travers la REP ni à travers d’autres exigences. Ainsi, il est indispensable d’être plus prescriptif afin de pousser la commande en réemploi, source du développement des filières. Les éco-organismes peuvent alors soutenir plus particulièrement les maîtres d’ouvrage des projets neufs et de rénovation qui intègrent des matériaux de réemploi. Point de vigilance, le soutien ne doit pas être un soutien à la tonne qui favorise des matériaux pondéreux, mais un soutien par unité et typologie de matériaux mis en œuvre. [NON MIS EN PLACE]
  • Adoption des éco-modulations liées à la réemployabilité dès 2026. [NON MIS EN PLACE]

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